Cet article a été rédigé par Caro B. il y a quelques mois pour une publication sur le site de RH Info. Il a été complété et reproduit ci-dessous. Les récents événements qui se sont produits à Paris au début du mois de janvier 2015 nous incitent à réactualiser et à re-contextualiser cet article. Le chapitre sur le projet de loi sur le renseignement a ainsi été ajouté ci-dessous, ainsi qu’une 31ème idée dans le chapitre des idées pour (re)trouver la paix digitale.

Concept de paix

« La paix (du latin pax) désigne habituellement un état de calme ou de tranquillité comme une absence de perturbation, d’agitation ou de conflit. Elle est parfois considérée comme un idéal social et politique. Sociologiquement, la paix désigne l’entente amicale de tous les individus qui composent une société. Psychologiquement la paix désigne l’état d’un esprit placide et serein et plus généralement de sentiments enthousiastes, et positifs. Elle est donc souhaitée pour soi-même et éventuellement pour les autres, au point de devenir une salutation (Pax vobis en latin, la paix soit sur toi, salaam en arabe, shalom en hébreu) ou un but de vie » (1).

L’univers digital vu sous l’angle de la psychologie sociale

1.     Le besoin de socialisation et d’interaction

Les médias sociaux sont des lieux de (re)groupement. Chaque réseau auquel nous appartenons possède sa propre dynamique, ses règles et est un lieu dans lequel se tisse des communautés d’action et de pensée qui orientent les conduites, structure les identités personnelles et collectives. La socialisation a trait au processus d’apprentissage des attitudes, des normes et des valeurs propres à un groupe, à travers lequel s’opère l’intégration sociale.

« Par leur intégration dans les groupes, les individus satisfont leur besoin de sécurité, et espèrent conquérir ou préserver des avantages ; un grand nombre des processus et des régulations qui se développent dans les groupes, en effet, ont pour finalité leur conservation et leur perdurée » (4).

Une des principales motivations à rejoindre et participer à un groupe, qu’il soit physique, symbolique ou encore que ses frontières soient virtuelles, sur Internet, est le besoin d’appartenance à une communauté dont on partage les valeurs, les croyances, les règles…

« Dans ce cadre, ce qui devient déterminant, c’est le sentiment d’appartenance qui lie l’individu à un ou plusieurs groupes […] On peut parler de groupe quand des personnes s’y définissent elles-mêmes comme membres (sentiment d’appartenance) et qu’en même temps, elles sont définies par d’autres comme membres du dit groupe (visibilité sociale, Brown, 2000) » (4).

2.     Les motivations du partage

Les individus se regroupent en réseaux pour échanger et partager, des liens, des informations, des idées, des questions, des opinions… Nous nous rassemblons et existons par ce que nous produisons. Au-delà des individus qui composent les groupes virtuels, gravitent autour des médias sociaux une multitude d’outils qui vous classeront, que vous le vouliez ou non, selon votre degré de popularité, d’activité, de rayonnement, d’influence, d’expertise…

« Si les groupes façonnent et socialisent les individus, leur imprimant leur mode de faire et de penser, ils sont aussi produits par eux » (4).

3.     Les conséquences pour l’individu

Comme dans toute groupalité, le contrôle social s’exerce au sein des communautés du social media. Cette forme de pression n’est pas à proprement parler un risque pour l’individu mais elle n’est pas à négliger dans le processus de structuration de l’identité individuelle et numérique et aussi, bien entendu, de la mise en œuvre d’une démarche de personal branding. Comme dans tout groupe, avec les médias sociaux et au sein de vos réseaux, vous trouverez toujours une oreille (plus ou moins discrète et distraite) pour accueillir mais aussi parfois pour juger et sanctionner vos propos, votre attitude ou votre personnalité.

« Si l’individu se conforme, dans bien des  cas, à ce qui y est attendu, il participe aussi à la création des normes qui orientent les conduites et les opinions dans un groupe » (4).

Selon Freud, dans la vie de chacun, intervient l’autre «autrui joue toujours dans la vie de l’individu le rôle d’un modèle, d’un objet, d’un associé ou d’un adversaire» (5). Pour ce qui concerne notre quête de la paix, comme idéal social, il y a donc bien un enjeu réel à côtoyer et interagir avec des ‘associés’ et ‘modèles’ plus qu’avec des adversaires !

La Nétiquette

La nétiquette est une règle informelle, puis une charte qui définit les règles de conduite et de politesse recommandées sur les premiers médias de communication mis à disposition par Internet. S’il ne fallait retenir qu’une règle : ce que vous ne feriez pas lors d’une conversation réelle face à votre correspondant, ne prenez pas l’Internet comme bouclier pour le faire. (2)

Extrait des règles de la Nétiquette (3) :

  • Ne vous impliquez pas dans des guerres incendiaires. Ne postez, ni répondez aux matières inflammables.
  • Comme pour d’autres environnements, il est prudent d’écouter d’abord pour apprendre à connaître la culture du groupe.
  • Il y a des groupes de nouvelles et des listes de distribution où on discute de sujets d’intérêts très larges et divers. Cela représente une variété de styles de vie, de religions et de cultures. Il n’est pas admis de poster des articles ou envoyer des messages à un groupe dont le point de vue vous choque, simplement pour dire qu’il vous choque.
  • Comme l’Internet embrasse le globe, souvenez-vous que les services d’information peuvent refléter des cultures et styles de vie franchement différents de ceux de votre communauté. Des choses que vous trouvez choquantes peuvent provenir de régions où elles sont acceptables. Restez sans parti pris.
  • Des messages tenant du harcèlement sexuel ou racial peuvent aussi avoir des implications légales. Il existe des logiciels capables de filtrer les éléments que vous pourriez trouver choquants.
  • Si vous échangez des arguments, gardez la discussion centrée sur le sujet plutôt que sur les personnes concernées.

Le projet de loi sur le renseignement

Tout juste deux semaines après l’attentat ayant frappé Charlie Hebdo, « http://www.lcp.fr/videos/reportages/167593-renseignement-un-projet-de-loi-fin-mars-pour-un-vote-debut-juin-le-guen » le gouvernement déclarait que le projet de loi sur le renseignement sera examiné fin mars 2015, en procédure d’urgence pour n’avoir qu’une seule lecture au Parlement, dans la perspective d’une adoption définitive début juin 2015 et celle de la parution des décrets d’application avant l’été.

Rappelons que la loi de programmation militaire promulguée par sa publication au Journal Officiel sous la référence « LOI n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale », a été décriée pour son article 13 sur la surveillance numérique devenu article 20 qui porte sur « l’accès administratif aux données de connexion ». « http://www.nextinpact.com/news/91534-le-decret-l-article-20-lpm-publie-on-fait-point.htm » En savoir plus.
Cet article a fait bondir les organisations professionnelles et militantes du Web qui s’interrogent sur la constitutionnalité de ce projet.

« http://www.atlantico.fr/decryptage/surveillance-internet-securite-1libertes-0-et-pour-efficacite-quel-score-erice-denece-etienne-drouard-1967414.html#78s3VwvzBEUW765b.99 » Dans cet article il la question suivante est posée « Quid de cette loi si un jour un parti peu démocratique arrive au pouvoir ? » et l’on peut lire :

  • Les interceptions de communications électroniques sont régies par la loi de 1991, mais aussi et surtout par la loi de programmation militaire de décembre 2013,
  • « Le gouvernement veut renforcer les capacités de surveillance d’internet par les services de renseignement pour mieux lutter contre le terrorisme. Le risque est que toute réelle possibilité de contrôle sur les procédures disparaisse » ;
  • et, l’on apprend que :
    • c’est la « http://lannuaire.service-public.fr/services_nationaux/autorite-administrative-independante_172128.html » CNCIS (Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité), et non la CNIL, qui a désignée dans le cadre de cette loi de programmation militaire, pour effectuer des contrôles. Or, « la CNIL est l’autorité en charge de la vie privée et de l’informatique, qui existe depuis 1978, qui dispose d’un corps d’ingénieurs d’inspection et de contrôle, qui opère déjà sur les fichiers des renseignements généraux depuis les années 1980 et pour les fichiers de police judiciaire depuis les années 1990 ».
    • « La CNCIS serait chargée de contrôler des volumes d’écoutes, mais pas la surveillance ni l’analyse informatique ». On est donc en droit en effet de s’étonner que le législateur n’ait pas pour l’instant désigné les institutions compétentes, et qu’il ait en plus, donné aucun pouvoir à celle qu’il a désignée.

30 idées pour (re)trouver la paix digitale

1-    Ménagez-vous et ne dépassez pas vos limites, autrement dit, préservez vos forces et ne présumez pas de celles-ci (Internet ne dort jamais et la première erreur serait d’oublier que vous êtes un humain parmi d’autres, dont les idées circulent dans le « tuyau ». Si vous aspirez être un super héro faites du cinéma, pas du web !).

2-    Faites des pauses pour ne pas succomber au FoMO (Fear Of Missing Out) (Cf. point 20 – En savoir plus sur la « http://ow.ly/HMh3o » nomophobie).

3-    Organisez-vous, faites des listes, définissez vos priorités, comptez votre temps par tâche (les réseaux sont chronophages et les seules limites sont celles que vous voudrez bien donner à votre psychisme et physiologie).

4-    Observez, lisez et écoutez, autrement dit, ouvrez-vous aux autres mais faîtes aussi le tri de l’information et de vos contacts avant de diffuser et partager. En étant trop autocentré, vous finirez par ressentir la frustration de la solitude consécutive à l’absence d’écho notamment. Avant de diffuser une information, mettez-vous à la place de vos destinataires et demandez-vous si vous aimeriez la lire et l’accueillir en l’état.

5-    Respectez-vous (si vous ne le faites pas, personne ne le fera à votre place !).

6-    Respectez les autres et l’avis de chacun, citez vos sources, ne spammez pas, favorisez le dialogue et veillez dans la mesure du possible, et si c’est nécessaire, à désamorcez un conflit naissant. Dans la vraie vie, en cas de conflit, comment réagissez-vous ? Faites de même !

7-    Sachez vous faire respecter (considérant que la timidité pourrait vous nuire, voire vous ronger, assumez ouvertement vos opinions sans dénigrer autrui vous permettra de vous différencier efficacement).

8-    Soyez transparent et authentique pour être crédible mais ne vous dévoilez pas trop et ne trichez pas sur votre identité.

9-    Soyez impliqué et proactif (si vous aspirez à ce que vos contacts vous identifient pour votre investissement et régularité).

10- N’essayez pas de plaire à tout le monde (vous n’y parviendrez pas de toutes manières, ici ou ailleurs et ce serait d’ailleurs suspect et même contre-productif !)

11- Blindez votre narcissisme (si vous faiblissez à la moindre critique ou attaque, vous deviendrez vite la proie idéale des sadiques, cf. point 7).

12- Ne répondez pas aux trolls (entraînés pour attaquer en groupe une proie esseulée, fatiguée, affaiblie ou distraite, tels des hyènes, si vous répondez à leur chef de file, vous vous exposez à une lutte inutile voire fatale).

13- Sachez remercier et célébrer les satisfactions individuelles ou collectives (vos contacts vous le rendront au centuple).

14- Apprenez à ne pas vous laisser instrumentaliser ou bien à manipuler les manipulateurs (demandez-vous toujours pour quelles raisons l’on vous sollicite avant d’agir et refuser de servir de prête nom, de caution, d’instrument sans garantie préalable).

15- Gardez la tête froide et faites preuve de modestie (ayez à l’esprit que si vous étiez une star cela se mesurerait davantage à votre portefeuille qu’à votre nombre de followers).

16- Trouvez vos alliés (les enjeux de pouvoir habitent tous les groupes, identifier et soigner vos alliés vous rendra plus fort, plus motivé et donc plus efficace).

17- Si vous partagez et donnez sans attendre en retour, vous serez davantage agréablement surpris que si vous donnez dans le principal objectif de recevoir (Cf. point 4 et 9).

18- Respectez vos engagements (la mémoire collective est une caractéristique de tout groupe).

19- En matière de contribution et de social media « Dans le doute, abstiens-toi » (Pythagore) parce que « L’ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit » (Aristote).

20- Ayez à l’esprit la théorie de l’engagement (6). L’effet pervers décrit par cette théorie consiste en ce que plus vous avez investi de temps et d’énergie pour exister dans les réseaux sociaux et plus vous aurez de difficulté à les désinvestir au profit d’une autre activité. Le symptôme addictif nous guette et vous fixer des objectifs, délais et points de rupture vous permettra de vous désengager à temps.

21- Maîtrisez les outils (ils sont vos premiers alliés si vous savez les utiliser et ils ont pas vocation d’être manipulés par vous et non l’inverse ! Certains ont la peau dure, abandonnez-les sans scrupule pour un autre !)

22- Partagez vos connaissances et votre savoir-faire mais synthétisez l’information que vous diffusez (cf. point 4).

23- Sachez prendre du recul en acceptant la critique, reconnaissant vos éventuelles erreurs d’appréciation voire en vous excusant et en vous retirant si nécessaire.

24- Cernez et gérer votre audience en fonction des sujets. Si vous ne ciblez votre audience selon vos sujets vous vous exposez aux foudres du community manager, garant de la ligne éditoriale voire pire, à celles du membre zélé investi de tous pouvoirs implicites ou légitimes !

25- Ne répondez pas « à chaud » aux critiques mais prenez quelques minutes de réflexion (nécessairement votre réaction paraitra pplus réfléchie et efficace).

26- Éviter les généralisations et les idées préconçues (de la même manière que vous pouvez refuser de faire l’objet d’une catégorisation sociale abusive !)

27- Tout problème a une solution ou une réponse, prenez le temps de rechercher celle-ci et sollicitez vos communautés en cas de besoin, mais de façon non systématique.

28- Recoupez vos sources et lisez les articles mis en lien avant de les partager, recommander (à défaut votre opportunisme pourrait être le signe du FoMO qui vous habite (Cf. point 2).

29- Ne fréquentez pas que des geeks, souvenez-vous que votre vie n’est pas que digitale : entre amis au restaurant c’est comme au saloon, laissez les armes digitales à l’entrée ! (Votre vie n’est pas que digitale et vos contacts novices vous le rappellerons quoi qu’il en soit).

30- Déléguez ce qui peut l’être (et dans ce cas, acceptez de payer le prix de votre tranquillité).

(Ajout du 23/01/2015)
31- N’oubliez jamais que vos communications éléctroniques pourraient désormais être surveillées, au nom de la préservation de la paix et de la liberté dans notre pays. Pour grossir le trait, vous disposez donc d’une totale liberté d’expression sur le territoire mondial de l’Internet MAIS, toutes vos communications sont susceptibles d’être surveillées par l’Etat Français et, que les djihadistes pourraient s’en prendre à votre intégrité physique si vos dessins ou écrits leur déplaisent.

Conclusion

L’équilibre entre nos besoins, nos aspirations, nos capacités, ce que notre idéal du moi nous pousse à dire ou faire, les attentes d’une multitude d’interlocuteurs avec lesquels nous sommes quotidiennement en relation sur les réseaux sociaux… est difficile à trouver !
Il appartient à chacun de nous d’interagir dans le respect de soi et des autres pour éprouver durablement le sentiment d’harmonie et aussi obtenir la satisfaction de nos besoins sociaux, auxquels nous aspirons lors de l’utilisation des technologies de l’information et des interactions virtuelles y afférent.

Loin d’être innée, parvenir à évoluer en paix avec soi-même et les autres est, au sein des réseaux sociaux, une démarche qui s’acquiert avec le temps, l’expérience et, bien souvent, au prix de certaines erreurs ou expérimentations déductives 😉

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Sources :

  • 1 « http://fr.wikipedia.org/wiki/Paix » Définition de la paix sur Wikipédia
  • 2 « http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9tiquette » Définition de Netiquette sur Wikipédia
  • 3 a) « http://www.sri.ucl.ac.be/SRI/rfc1855.fr.html » Les règles de la Netiquette
  • 3 b) « http://www.albion.com/netiquette/corerules.html » THE CORE RULES OF NETIQUETTE, Virginia Shea
  • 4 Le groupe en psychologie sociale, Verena Aebischer et Dominique Oberlé, Dunod, 2012 – 4ème édition.
  • 5 Essais de psychanalyse, Sigmund Freud, Payot, Juin 1999.
  • 6 Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, Robert Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois, Éditions Presses Universitaires de Grenoble, 2002
  • « http://ow.ly/HMy2E » Comment gérer la prise de parole des salariés sur les médias sociaux – HBR
  • « http://ow.ly/HMy5A » Les grandes tendances RH dans le monde en 2014 | HR Speaks 2014
  • « http://ow.ly/HMy6O » Bad buzz sur les réseaux sociaux: les RH doivent s’impliquer – L’Express L’Entreprise – par @Actuel_RH avec @VinceBerthelot et @CaroBlancot
  • Surveillance d’internet : sécurité 1- libertés 0. Et pour l’efficacité, quel score ? « http://ow.ly/HNYnh » http://ow.ly/HNYnh
  • La phobie d’être éloigné de son smartphone bien réelle… http://ow.ly/HMh3o